De facto n°28 | Octobre 2021

28 | Octobre 2021 

Vivre le transnational : Ancrages et circulations en débat 

La pers­pec­tive trans­na­tio­nale a permis aux études migra­toires d’appréhender les liens fami­liaux, poli­tiques, cultu­rels, écono­miques qui se nouent au-delà des fron­tières natio­nales. Parti­ci­pant à la réflexion sur la mondia­li­sa­tion, un cosmo­po­li­tisme « par le bas » a ainsi pu être célébré mettant en avant les multiples arti­cu­la­tions entre sociétés d’origine et d’installation. Ce para­digme est aujourd’hui confronté à des travaux qui insistent davan­tage sur le renfor­ce­ment des fron­tières natio­nales et la défi­ni­tion de la migra­tion en enjeux de contrôle. Le trans­na­tional, comme cadre de pensée et de pratiques, serait donc confronté à ses limites. L’accent mis sur la flexi­bi­lité, la mobi­lité, la capa­cité d’ac­tion des migrants obscur­ci­rait la compré­hen­sion des entraves à la mobi­lité. L’évolution des poli­tiques migra­toires et la pandémie actuelle nous invitent en effet à repenser la complexité des rela­tions entre circu­la­tion et installation.

La troi­sième journée scien­ti­fique de l’Institut Conver­gences Migra­tions, dont les enre­gis­tre­ments sont dispo­nibles sur notre chaîne Youtube, a porté un regard critique sur ce para­digme. À rebours d’un engoue­ment pour le trans­na­tional ou d’une emphase sur un supposé « retour du national », les contri­bu­tions qui en sont ici tirées saisissent empi­ri­que­ment les carac­té­ris­tiques de ce vécu aujourd’hui. Tout d’abord, Camille Schmoll tire un bilan des travaux sur le trans­na­tional en montrant à la fois les limites et les pers­pec­tives qu’ils ont pu ouvrir. À la lumière de ses recherches sur les expa­triés améri­cains en France au début du 20ème siècle, Nancy L. Green démontre que le trans­na­tional n’est pas un phéno­mène nouveau ni fluide. Amélie Grysole examine les raisons qui amènent les parents de la diaspora séné­ga­laise à confier leurs enfants à leur famille dans leur pays d’origine. Laurent Faret revient, en carte, sur la diffi­culté à déve­lopper des dispo­si­tifs trans­na­tio­naux dans un espace mexi­cain où le contrôle des mobi­lités est de plus en plus prégnant. À partir d’images de presse, Adèle Sutre décèle le sens de la repré­sen­ta­tion de soi déve­loppé par les familles tsiganes au cours de leur mobi­lité dans l’entre-deux-guerres en Amérique du Nord. Enfin, Stéphane Dufoix nous rappelle que les idées sont aussi en mouve­ment. Il propose de ques­tionner le recours aux para­digmes circu­la­toires pour mieux plaider en faveur d’une déco­lo­ni­sa­tion de savoirs construits comme universels.

Damien Simon­neau,
Coor­di­na­teur scien­ti­fique du numéro

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