SOUT : Sarah Boisson soutient sa thèse « Des chirurgies sexuelles féminines de « reconstruction » : circulation de pratiques médicales et construction des corps féminins en médecine. Une enquête multi-située entre France et Égypte : du corps exilé au corps globalisé », 06 février 2023, 14h30, Université Côte d’Azur

  • 14h30
  • Univer­sité Côte d’Azur, MSHS Sud-Est Pôle univer­si­taire Saint Jean d’An­gély 3, 24 avenue des Diables Bleus – 06300 Nice, en salle plate (031)

Jury :

Domi­nique Memmi, Direc­trice de recherche CNRS émérite, Cresppa, Univer­sité Paris 8

Jean-Michel Lafleur, Profes­seur de Recherche, CEDEM, Univer­sité de Liège

Véro­nique Petit, Profes­seure des Univer­sités, CEPED, Univer­sité de Paris

Nicolas Puig, Direc­teur de recherche IRD, URMIS, Univer­sité de Paris

Laura Schuft, Maîtresse de confé­rences, URMIS, Univer­sité Côte d’Azur

Marie Lesclin­gand, Profes­seure des Univer­sités, URMIS, Univer­sité Côte d’Azur

Résumé de la thèse : Au cours de l’histoire, se sont obser­vées dans diffé­rentes zones géogra­phiques et à diffé­rentes époques des pratiques de modi­fi­ca­tions géni­tales fémi­nines comme l’excision, des clito­ri­dec­to­mies (abla­tion du clitoris), des sutures et autres inter­ven­tions sur l’hymen. Loin d’être disqua­li­fiées par l’apparition de la méde­cine moderne, certaines de ces pratiques, ou leur répa­ra­tion, ont été assi­mi­lées par le secteur médical, et de ce fait, légi­ti­mées. Les progrès de la sphère biomé­di­cale depuis les années 1970 ont ouvert un nouveau champ médical autour des tech­niques chirur­gi­cales de (re)constructions géni­tales fémi­nines. Cette thèse se concentre donc sur des pratiques chirur­gi­cales de « recons­truc­tion », celle de la restau­ra­tion de l’hymen (hymé­no­plastie) et celle de la recons­truc­tion du clitoris (réha­bi­li­ta­tion clito­ri­dienne) après une exci­sion, tout en ques­tion­nant leurs circu­la­tions entre la France et l’Afrique du Nord – en Egypte et en Tunisie, leurs moda­lités de trans­mis­sion et d’adaptations à des contextes natio­naux et sub-natio­naux diffé­rents. S’interroger sur la circu­la­tion de tech­niques médi­cales « de l’intime » et les concep­tions du « recons­truire » génital, permet d’aborder plusieurs terrains où sont mises en œuvre ces opéra­tions. En effet, plusieurs travaux se sont inté­ressés à ces recons­truc­tions dans le contexte euro­péen d’immigration. Néan­moins, leur implan­ta­tion et la circu­la­tion dans les pays d’origine, liées à la mobi­lité des professionnel∙les de santé, des patientes et la circu­la­tion des savoirs médi­caux n’a jusqu’à présent pas fait l’objet de travaux scien­ti­fiques en sciences sociales. C’est donc une approche globale multi-située de l’étude de pratiques médi­cales trai­tant de l’intime féminin et de l’idée de (re)construire le sexe des femmes dans diffé­rents terrains qui a été mise en œuvre et qui tend en cela à dépasser certains biais ethno­cen­trés. Le discours médical inter­na­tional et ses décli­nai­sons locales semblent s’accorder sur le fait que cette chirurgie est d’abord une demande « cultu­rel­le­ment » située et se retrouve alors traitée avec distance par les professionnel∙les de santé sous le prisme d’une pratique venue « d’ailleurs » ou propre à une « culture » dont ils se déso­li­da­risent. En quoi ces chirur­gies s’inscrivent-elles dans des rapports de genre, de classe, ainsi que dans les rapports Nord-Sud, dans ces diffé­rents contextes socio-cultu­rels ? Comment celles-ci se déploient-elles dans un nouveau para­digme de santé globale où se juxta­posent des phéno­mènes migra­toires et de circu­la­tion de pratiques ? Ces tech­niques s’articulent donc toutes deux avec des impé­ra­tifs dits « tradi­tion­nels » ou « cultu­rels » et semblent ainsi s’inscrire dans des processus de contour­ne­ments norma­tifs mis en œuvre par les femmes qui demandent une inter­ven­tion recons­truc­trice sur leurs parties géni­tales. Des mythes anato­miques et une produc­tion active et struc­tu­relle d’ignorance – iden­ti­fiée et analysée au moyen de l’approche des igno­rance studies – sur l’appareil génital se forment et se retrouvent alors au cœur de ces demandes chirur­gi­cales. La métho­do­logie déve­loppée conjugue une recherche multi-située par entre­tiens semi-direc­tifs (n=65) avec des m édecins, des femmes – patientes ayant ou envi­sa­geant de réaliser l’une des deux opéra­tions -, et des acteur∙trices d’institutions ou d’associations gravi­tant autour de ces procé­dures médi­cales, ainsi que des obser­va­tions ethno­gra­phiques dans le milieu médical et dans des groupes de paroles de patientes. Une étude textuelle d’un corpus de presse (n=204 articles sélec­tionnés) dans le contexte média­tique fran­çais touchant à la repré­sen­ta­tion de ces chirur­gies dans l’espace public vient compléter cette recherche. Des données chif­frées rela­tives à la fréquence des actes médi­caux mino­ri­taires et des données socio-démo­gra­phiques sur le contexte de réali­sa­tion de ces inter­ven­tions ont égale­ment été mobi­li­sées selon leur dispo­ni­bi­lité dans les diffé­rents contextes étudiés. Il ressort de cette étude que ces chirur­gies sont iden­ti­fiées dans le discours médical des praticien∙nes interrogé·es comme des « pratiques ethniques » – ou au moins socia­le­ment situées dans des espaces où les personnes sont plus forte­ment soumises à la « culture ». Elles s’inscrivent aussi dans des circu­la­tions et des adap­ta­tions en lien avec les discours iden­ti­taires sur le « natio­na­lisme » sexuel. Tous les discours collectés ont une dimen­sion cultu­ra­li­sante et alté­ri­sante vis-à-vis des groupes socio-cultu­rels auxquels appar­tiennent les patientes. Ces processus se maté­ria­lisent de manière diffé­ren­ciée selon les lieux d’étude. Néan­moins, ces chirur­gies semblent toujours jouer un rôle « inté­gra­teur » sur le plan corporel soit pour se main­tenir dans un milieu social, soit pour s’adapter à un nouveau milieu ou contexte.

Mots clés : chirurgie sexuelle fémi­nine – circu­la­tion de pratiques médi­cales – migra­tion – Santé et genre – Recons­truc­tion géni­tale fémi­nines – hymé­no­plastie – réha­bi­li­ta­tion clito­ri­dienne – modi­fi­ca­tion géni­tales féminines.

Lien Zoom : https://​univ​-cote​dazur​.zoom​.us/​j​/​8​4​6​2​1​5​8​7​2​9​4​?​p​w​d​=​R​j​Z​y​V​n​V​k​L​0​w​2​b​D​B​6​V​H​F​U​U​W​J​3​M​W​dJdz09