CR du colloque organisé par le groupe de recherche Thanatic Ethics
Les membres de MoCoMi ont présenté trois communications :
- Nada Afiouni, “ Momo’s Journey” ;
- Linda Haapajärvi, “Fixing the final journey. Varieties of transnational death money and belonging” ;
- Filippo Furri, Carolina Kobelinsky et Françoise Lestage, “Databases for the Dead border-crossers. Activists and Academics Uses under Scutiny”.
Trente communications ont été présentées et trois conférenciers sont intervenus : Didier Fassin, anthropologue à l’EHESS et à Princenton ; Elleke Boehmer, professeure de littérature mondiale en anglais à l’Université d’Oxford (post-colonial studies) et Achille Mbembe, professeur d’histoire à Witwaterstrand. Ces trois conférenciers reflétait le parti-pris du colloque de réunir des chercheurs des sciences sociales et des humanités (littérature, art) dans des tables-rondes thématiques.
L’ensemble du colloque portait sur les rapports entre les morts et les vivants en migration et des thématiques très nombreuses et diverses : visibilité/invisibilité ; les frontières ; le voyage ; les familles ; les humanitaires ; spectres et fantômes ; politiques de deuil ; politiques d’affliction. Une seule table-ronde, avec deux intervenantes, était directement consacrée aux effets du COVID 19 : « Body repatriation in times of Covid » dont Nada Afiouni était la modératrice. Yumna Masarwa, chercheuse, a présenté la communication « Enacting Death and Islamic Funerary Rites in the Shadow of Covid 19”, Syd Bolton et Catriona Jarvis, deux activistes anglais, ont fait une présentation intitulée “Contemporary Rituality, its Economics, its Administration and its Politics”, et Félicien de Heusch a terminé avec l’intervention “States and Diasporas Facing Death in Migration : A Comparative Analysis of the Senegalese and Tunisian Cases Before and During the Covid-19 Pandemic”. La première se fonde sur un travail de terrain réalisé à Marseille consistant à observer les personnes qui lavent et prennent soin des corps des musulmans et la façon dont elles ont fait face aux règles imposées par le gouvernement pendant la pandémie. Selon elle, la réponse des familles et des entreprises de pompes funèbres à ces règles a transformé les rituels funéraires. Les seconds, militants fondateurs de ‘The Last Right Project’, ont rédigé un rapport sur la situation intitulé « Every body counts : Death, COVID 19 and migration ». Ils exposent ce que contient une déclaration mise au point et signée en 2018 par plusieurs experts des migrations, et appelée Déclaration de Mytilini pour le traitement digne de toutes les personnes disparues ou décédées et de leurs familles à la suite de voyages de migrants (Last Rights Mytilini Declaration). Elle précise les obligations des autorités, les droits des familles et propose des protocoles et des mesures qui permettent de remplir ces obligations dans le respect des morts et des disparus. Les effets du Covid ont également été mentionnés par d’autres intervenants sans faire l’objet des communications ou des tables-rondes. La présentation de Félicien de Heusch, doctorant à l’Université de Liège, mettait en avant les différences dans l’investissement des États tunisien et sénégalais dans le processus de rapatriement en temps de Covid, tout en soulignant une tradition interventionniste tunisienne et une politique de laissez-faire du côté sénégalais.
Aux activités de présentation et discussion, très denses, il faut ajouter un programme d’évènements culturels. Elsa Gomis, réalisatrice et post-doctorante à Oxford, a présenté trois court-métrages sur le thème de la mémoire familiale en migration tandis que l’artiste peintre iranien, Majid Amin, ayant vécu dans la jungle de Calais et résidant aujourd’hui en Angleterre, a exposé ses œuvres retraçant son odyssée migratoire. Et Alessandro Corso, chercheur postdoctorant, a discuté de sa façon de concilier la peinture et l’enquête ethnographique lors de ses recherches sur la vie des migrants à la frontière de Lampedusa.