PUBLI : Lucas Puygrenier, « Un salariat au-delà du marché de l’emploi : le travail migrant ou le travail illibéral à l’île Maurice », Sociologie du Travail, vol. 63, n°3, 2021

Présen­ta­tion

À partir d’une enquête sur le travail migrant réalisée au sein d’un site indus­triel délo­ca­lisé, les usines de l’île Maurice, cet article explore la routine d’un sala­riat qui échappe à l’institution libé­rale du marché de l’emploi. En propo­sant le concept de « travail illi­béral », l’article met en évidence deux dimen­sions de l’emploi des étran­gers. Celui-ci constitue tout d’abord une marchan­di­sa­tion empê­chée du travail, solu­tion des employeurs locaux face à un sala­riat local jugé trop désin­volte et trop peu engagé dans les processus de produc­tion. Sujette à une série de règles formelles ou infor­melles impo­sées par l’État, les employeurs et leurs inter­mé­diaires, la main‑d’œuvre étran­gère est en effet contrainte à une dispo­ni­bi­lité tempo­relle constante permet­tant aux indus­triels d’adapter les temps de travail aux fluc­tua­tions de la demande inter­na­tio­nale. Mais le recours à l’emploi des étran­gers constitue égale­ment une réforme de l’économie morale du monde indus­triel mauri­cien, une distri­bu­tion nouvelle des obli­ga­tions réci­proques entre le « bon travailleur » et le « juste employeur » mani­feste notam­ment lorsqu’émergent les conflits du travail.