SOUTENANCE DE THÈSE Maroussia Ferry « Ce que nous aurions perdu Anthropologie de la crise en Géorgie postsoviétique (1991–2015) » — 19 décembre 2018, Paris

Titre de la thèse

« Ce que nous aurions perdu 
Anthro­po­logie de la crise en Géorgie post­so­vié­tique (1991–2015) »

Composition du jury

  • Mr. Alain BLUM, direc­teur de thèse
  • Mr Benoît FLICHE, co-direc­teur de thèse
  • Mme. Michèle BAUSSANT, examinatrice
  • Mme. Elena FILIPPOVA, rapporteure
  • Mr. Ismaël MOYA, examinateur
  • Mme. Silvia SERRANO, rapporteure

Informations pratiques

  • La soute­nance aura lieu le mercredi 19 décembre 2018 à 14h à l’École des Hautes Études en Sciences sociales, 54 boule­vard Raspail, 75006 Paris, en salle BS1-28 (sous-sol).
  • Contact : maroussia.​ferry@​ehess.​fr

Résumé

Cette recherche porte sur les recom­po­si­tions des écono­mies morales en Géorgie liées à la crise écono­mique et poli­tique profonde qu’a traversée et traverse encore ce nouvel État. À la chute de l’Union Sovié­tique, l’économie de la Géorgie s’est effon­drée bruta­le­ment tandis que ses insti­tu­tions étatiques s’affaiblissaient dras­ti­que­ment et qu’éclataient sur son terri­toire deux guerres sépa­ra­tistes et une guerre civile. Les socia­lités, notam­ment fami­liales et amicales, en ont été boule­ver­sées. Dans ce travail, nous analy­sons les crises struc­tu­relles ainsi que les recom­po­si­tions de ces liens sociaux. Nos analyses sont fondées sur une enquête ethno­gra­phique de trois années menée auprès d’une popu­la­tion urbaine déclassée et préca­risée. Celle-ci est encline aux migra­tions de travail, forte­ment fémi­ni­sées en Géorgie, et touchée par de nombreux suren­det­te­ments. Nous montrons comment ces deux phéno­mènes, qui touchent aux tempo­ra­lités biogra­phiques et aux prises de risques, s’articulent à un senti­ment plus large de rupture et de perte histo­rique dont la mémoire est retra­vaillée pour tenter de faire lien à nouveau. Nous déve­lop­pons la thèse selon laquelle l’articulation entre ces diffé­rentes figures de la crise a entraîné une recon­fi­gu­ra­tion de la confiance et des pratiques de dons réci­proques. Celles-ci inter­viennent dans un contexte de rupture avec les normes de genre qui se cris­tal­lise notam­ment autour de la migra­tion fémi­nine et de la défaillance du rôle masculin comme pour­voyeur écono­mique de la famille. Nous montrons enfin que ces recom­po­si­tions entraînent un resser­re­ment des soli­da­rités fami­liales sur le lien filial maternel qui, par son asymé­trie, et parfois par son immo­ra­lité-même, fait jouer plei­ne­ment les réin­ter­pré­ta­tions compen­sa­toires des ethos de genre telles que la valo­ri­sa­tion d’un certain tragique masculin et celle du don sacri­fi­ciel féminin. Les obli­ga­tions morales et écono­miques inhé­rentes à ce lien permettent plus large­ment aux socia­lités d’être revi­si­tées afin de composer avec la crise post­so­vié­tique géorgienne.