De facto n°30 | Janvier 2022

30 | Janvier 2022 

Les migrations dans l’œil des médias : infox, influence et opinion 

D’après un récent sondage, l’immigration n’est une préoc­cu­pa­tion que pour 29 % des Fran­çais et Fran­çaises, loin derrière le pouvoir d’achat (51 %), le système de santé (32 %) et l’environnement (30 %). Pour­tant, l’immigration est le deuxième sujet porté par les candi­dats et candi­dates à la prési­den­tielle 2022, après l’épidémie de Covid-19, et il fait l’objet de nombreuses fake news, ou infox en fran­çais. Ce terme, retenu par l’Académie Fran­çaise en octobre 2018, désigne une infor­ma­tion menson­gère ou déli­bé­ré­ment biaisée pour induire en erreur et être diffusée auprès d’un large public. À cet égard, le rôle des médias, notam­ment dans le cadre du direct, et des réseaux sociaux est fonda­mental. Ils contri­buent à influencer l’opinion publique, c’est-à-dire l’état d’esprit majo­ri­taire de la popu­la­tion, et, indi­rec­te­ment, le vote des citoyens et citoyennes. La qualité du trai­te­ment média­tique d’un sujet sociétal aussi central que la migra­tion est un enjeu essen­tiel pour la démo­cratie : sans débat public informé, repo­sant sur des faits établis et des infor­ma­tions fiables, point de propo­si­tions poli­tiques réalistes et perti­nentes, point non plus de confiance et de choix informés de la part des citoyens et citoyennes.

Le déca­lage entre les préoc­cu­pa­tions réelles de la popu­la­tion et la couver­ture des ques­tions migra­toires dans l’espace média­tique est au cœur de ce numéro de De facto. Les écono­mistes Jérôme Valette et Sarah Schneider-Strawc­zynski montrent ainsi l’impact du temps d’antenne et du trai­te­ment jour­na­lis­tique consacré à l’immigration à la télé­vi­sion sur les atti­tudes des citoyens et citoyennes fran­çaises. Du côté des réseaux sociaux, Katha­rina Tittel, socio­logue, observe que la mention de la natio­na­lité dans les articles de presse sur l’immigration suscite plus de réac­tions des utili­sa­teurs de Face­book. La poli­tiste Marie Moncada présente le projet BRIDGES qui explore le rôle des acteurs poli­tiques et média­tiques comme des produc­teurs de récits migra­toires. Emeric Henry, écono­miste, explique quels sont les effets et limites du fact checking et son rôle en période élec­to­rale. À partir du photo­graphe Samuel Gratacap sur les migrants en Libye, Perin Emel Yavuz retrace les ques­tion­ne­ments éthiques et la tempo­ra­lité du docu­men­taire, loin du coup média­tique. Enfin, la jour­na­liste Marie Verdier nous inter­pelle sur le contexte actuel de régres­sion géné­ra­lisée sur les ques­tions migratoires.

Barbara Joannon, Audrey Lenoël, Hélène Thiollet et Perin Emel Yavuz, coor­di­na­trices scientifiques

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